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Je Déblogue
4 novembre 2008

Maman a beaucoup parlé de ce moment. Elle a

Maman a beaucoup parlé de ce moment. Elle a choisi cette drôle de chanson de Tom Waits. Elle a choisi cette église de Boulogne, ville où elle a vécu 40 ans. Elle a tenu à ce qu’on dise qu’elle y a été heureuse.

Elle voulait aussi que ses enfants et petits- enfants lisent des poèmes, chantent, jouent de la musique, fassent des claquettes…Pour les poèmes c’est d’accord, Aurel et Luce, puis PC et Maud interviendront après moi, mais pour le reste et en particulier les claquettes, nous n’en avons pas le courage.

Elle me disait, pas très souvent mais régulièrement, que je ne faisais pas les choses comme il fallait. Aujourd’hui encore c’est ce qu’elle me dirait. Mais je sais aussi que ça la ferait sourire , parce qu’elle avait beaucoup d’humour, un humour à l’anglaise bien sûr, celui de Lewis Carroll et du « non-sens », de la contradiction : désireuse de convenance mais la première à en rigoler (elle n’aurait pas aimé que je dise « rigoler ») : cette réunion, elle la voulait dans une église alors qu’elle ne croyait pas, une chose et son contraire…Ma mère était une enmerdeuse, personne ne le niera, c’était une de ses qualités.

Une autre de ses qualités était sa curiosité, pour l’art, la littérature et surtout les autres cultures. La culture anglaise évidemment mais elle était aussi hispanophone, elle avait étudié le swahili pendant 3 ans aux langues o après être allée au Kenya, elle s’était sérieusement mis à l’apprentissage du grec moderne depuis sa rencontre avec la belle-famille de Maud, elle se serait mis au martien si elle avait rencontré un extra-terrestre sympathique.

 

Maintenant, j’aimerai vous dire quelques petites choses de ses derniers jours, ces petites choses qui lui ressemblent…

A la maison, la dernière fois que nous avons regardé la télévision, c’était la retransmission d’un spectacle de l’humoriste Gad El Maleh, qu’elle ne connaissait pas mais qui l’a bien fait rire .Elle m’a dit être ravie de l’avoir découvert avant de mourir car jusque là elle détestait la télévision qu’elle n’a jamais eu et riait plutôt aux aphorismes d’Oscar Wilde ou aux articles de Charlie Hebdo.

Le soir, elle se faisait lire par sa petite fille « Enfantasques », des poèmes de Claude Roy.

La dernière chose dont elle a eu envie et qu’elle a eue la force de demander, c’est une Pelfort Brune. Elle en a bue une gorgée et demie avec plaisir.

Quant, venant voir sa grand’mère pour la dernière fois, Aurel lui a demandé « ça va Bonn’Mam’ ? », elle a ouvert difficilement un œil, lui a souri quand il se penchait vers elle pour l’embrasser et elle a répondu « Acouna matata ». En swahili, ça veut dire « pas de problèmes ».

C’est ce que j’ai envie de vous répéter, pour elle (et aussi parce que j’ai envie d’y croire) : acouna matata.

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